Voici le compte-rendu d’une
bataille Ier Empire qui s’est tenue à la mi-octobre dernier au WOC, le
« club » pas très officiel qui se réunit régulièrement dans la salle
de jeu d’un copain à Orcet, près de Clermont. La partie remonte un peu mais je
n’ai pas eu le temps de faire ce CR avant, alors il sera peut-être un peu
approximatif mais le principal, c’est d’en parler. J
Trois photographes se sont
relayés pour immortaliser cette journée. Comme d’habitude, désolé pour la
médiocrité de certaines images…
Voici d'abord quelques vues de la préparation de la table avec Christian :
Le champ de bataille !
Devant nous à droite, Heinrichsdorf, village très important qui verrouille la route de Königsberg.
Le plan de la table.
Heinrichsdorf est en haut à gauche, Friedland au centre à droite et le bois de Sortlack en bas à gauche.
L'aile droite française et le bois de Sortlack
Ce jour-là, les membres
éparpillés du WOC étaient presque au complet autour du maître des lieux
Christian : Christophe, Patrick, Stéphane, Bruno et Franck, ce qui était
déjà inespéré. Mais, cerise sur le gâteau, nous avions également 3 invités
venus du Périgord et de Corrèze pour l’occasion. Ce prompt renfort était plus
que bienvenu puisqu’il me permettait enfin d’organiser une vraie
« grande » bataille. Bon, « grande », c’est tout relatif
mais tout de même, c’est la première fois que j’arrivais à réunir 9 joueurs sur
une journée.
L’idée était de rejouer la
bataille de Friedland, livrée par l’empereur Napoléon aux Russes de Bennigsen
lors de la campagne de Pologne en juin 1807. Le scénar débute vers 14h00. Dans
la réalité, on se bat déjà depuis 3 ou 4 heures du matin mais l’armée française
termine sa concentration et dans l’optique de Napoléon, la bataille va enfin
commencer. Les Russes sont presque tous passés sur la rive gauche de l’Alle et
ils vont devoir combattre avec la rivière à dos !
L’ordre de bataille mis en place
respecte les grandes formations (divisions, corps d’armée) engagées dans la
bataille, même si la très grande taille des armées en présence m’a amené à
réduire le nombre d’unités sur table dans un certain pourcentage. On a donc joué
142 bataillons et 80 unités de cavalerie sur une table d’environ 6 mètres de
long par 1,80 de profondeur.
La cavalerie de Grouchy devant Heinrichsdorf
Briefing du matin, je passe en revue l'aile gauche russe devant Patrick et Stef très attentifs.
Déploiement du centre russe.
Derrière en contrebas du plateau, la garde du tsar.
Bennigsen, général en chef russe.
Le briefing se passe à 10h du matin, suivi de la
réunion des états-majors (début de la partie de figs vers 11h).
Chez les Russes, Christian
commande l’aile droite dans le rôle du prince
Gortshakov (3ème division d’infanterie, cavalerie d’Uvarov et de
Kollogribov : 10 bataillons, 15 escadrons, 36 pièces en 3 batteries) ;
Thierry le Périgourdin dirige le centre en tant que Dokhtorov (7ème et 8ème divisions, cavalerie
du prince Gallitzin : 10 bataillons, 10 escadrons, 48 canons en 4
batteries). L’infanterie de la garde impériale est derrière le centre (10
bataillons). De l’autre côté du Mühlenbach, l’aile gauche est partagée
entre Patrick (Lvov, 2ème
et 6ème divisions, cavalerie de Kretow : 10 bataillons, 6 escadrons, 70
pièces en 5 batteries) et Stéphane (prince Bagration, le meilleur général russe, avec la puissante avant-garde
de l’armée : 18 bataillons, 4 escadrons, 12 pièces en 1 batterie).
Sur la rive droite se trouvent
encore quelques renforts potentiels qui n’ont pas participé à la vraie bataille
mais que les joueurs russes peuvent appeler à eux, moyennant la perte de
quelques points de victoire.
Côté français, Christophe
commande l’aile gauche du maréchal
Mortier qui couvre la route de Königsberg avec la cavalerie de
Grouchy et le VIIIème corps (12
bataillons, 14 escadrons, 28 pièces en 4 batteries) ; Bruno fait le
centre gauche avec la division Verdier
du corps de Lannes (8 bataillons et 16 pièces en 2 batteries), la Garde impériale
viendra se ranger derrière lui (6 bataillons, 6 escadrons et 22 pièces en 3
batteries) ; à sa droite, Jean-Pierre le Corrézien commande le reste
du corps de réserve de Lannes en
plein centre (division des grenadiers d’Oudinot et division de cuirassiers de
Nansouty, soit à peu près toutes les troupes d’élite françaises hormis la Garde :
10
bataillons, 10 escadrons et 14 pièces en 2 batteries) ; Michel le 2°
Périgourdin joue le rôle de Ney, commandant le VIème corps et les
dragons de Latour-Maubourg à l’aile droite (13 bataillons, 7 escadrons, 14 pièces en 2
batteries).
Pour ma part, je vais superviser
le début de partie puisque nos 3 invités, bien que joueurs expérimentés, ne
connaissent pas du tout la règle et 2 de « nos » joueurs ne l’ont pas
pratiquée depuis des lustres. Autant dire que je flippe un peu en espérant que
scénar et règle tournent comme il faut ! Par la suite, je prendrai le
commandement des renforts, dragons de Lahoussaye puis Ier corps du général Victor qui arriveront par la
route d’Eylau, entre Lannes et Ney (16 bataillons, 6 escadrons, 22 pièces en 3 batteries).
La garde française est également
sujette à la règle qui nous fait perdre des points de victoire si elle est
engagée.
Tout ça commence sur les chapeaux
de roue, puisque Jean-Pierre au centre fonce directement avec ses deux
divisions sur le plateau. Je me dis que si l’attaque tourne mal, Napoléon va se
retourner dans ses Invalides parce qu’on n’aura rien pour boucher le
trou ! A sa gauche, Bruno le soutient en s’avançant dans le vallon qui le
sépare du centre russe.
L'attaque de Lannes
Les cuirassiers de Nansouty et les grenadiers d'Oudinot
De son côté, Christophe, dont l’objectif est la défense de Heinrichsdorf, sur la route de Königsberg, joue l’attente (comme Mortier dans la réalité) et replie courageusement sa cavalerie pour retarder l’affrontement au maximum J
Le vaste mouvement de la cavalerie russe.
Les dragons français se repositionnent.
A droite également, Michel choisit de temporiser en voyant son adversaire direct, Bagration, prendre des allures offensives. Ceci ne m’étonne pas de Stéphane qui n’est pas du genre à attendre de son côté.
Par contre j’ai l’impression d’un manque chez les Russes. Ou plutôt c’est une impression qui va se dessiner petit à petit et lorsque je comprends ce qui ne va pas, il est trop tard pour modifier le cours des choses. En effet, le matin, Stéphane a loupé le briefing général et est arrivé juste pour la réunion d’état-major russe. Je lui ai donc fait un topo rapide de la situation mais j’ai oublié de mentionner l’arrivée des renforts de Victor (leur point d’entrée est connu des Russes). Or personne dans son camp n’a songé à l’en avertir et il ne s’attend pas à ce que les forces françaises face à lui double quasiment leur effectif au bout de quelques tours. Ce qui explique un mouvement offensif trop orienté vers l’extrême gauche de la ligne russe et le bois de Sortlack alors que les objectifs principaux étaient plutôt sur leur droite vers la route de Königsberg ! s’il avait connu la présence des renforts français, il n’aurait certainement pas attaqué de cette manière-là.
Une autre surprise vient du fait
que Christian attire toute la cavalerie russe, celle du centre y compris, vers
son aile droite, tout en retardant son attaque. Ceci laisse le temps à
Christophe de reformer sa ligne de défense et à la cavalerie de la garde
française de partir le renforcer dès son arrivée sur la table.
La cavalerie russe tente de flanquer Grouchy.
Sur le plateau
au centre, les Russes se sont imprudemment étirés pour lier l’aile de cavalerie
de Christian, en déportant notamment plusieurs batteries d’artillerie vers leur
droite. De plus, les premiers combats de Lannes tournent aussitôt à son
avantage. Les grenadiers d’Oudinot bousculent les bataillons russes et
Jean-Pierre n’hésite pas une seconde à lancer les escadrons de Nansouty sur les
carrés et les batteries russes ! Tout ceci avec succès malgré quelques
actes d’héroïsme pur de la part des troupes de Thierry. Malheureusement pour
lui, les tours de combat passent et sa ligne se disloque petit à petit,
d’autant qu’il n’a plus un seul escadron pour le soutenir, Christian ayant
piqué toute la cavalerie ! On voit ici que l’utilisation des trois armes
fonctionne correctement : les cavaliers français forcent les bataillons
russes à se former en carrés qui se font aussitôt démolir par la puissante
batterie installée aux côtés de l’état-major de l’empereur, avant d’être
détruits pas l’action de l’infanterie et des cuirassiers.
A droite de l'image, la division Verdier appuie la progression du maréchal Lannes
Ses tirailleurs menacent vite les batteries russes du plateau.
Premiers contacts, les carrés russes repoussent les cuirassiers
Les bataillons russes vont se battre comme des diables...
...mais la grande batterie française ne leur laisse pas de répit.
Comme la Garde russe s’est
avancée (une grande partie envoyée dans Friedland, le reste sur le plateau), il
n’y a plus de réserves et les troupes d’Olsufiev doivent franchir l’Alle. Leur
arrivée est salutaire et sauve momentanément la situation au centre. Mais
l’action de Lannes n’est que retardée et non enrayée.
Pendant ce temps, Grouchy a été
engagé par la cavalerie russe. Christophe n’est pas très optimiste d’autant
qu’il a déjà perdu une batterie sous le feu de l’artillerie à cheval d’Uvarov.
Les premiers combats tournent à son désavantage. Les pertes sont sévères mais
il arrive tant bien que mal à contenir l’ennemi jusqu’à l’arrivée de la
cavalerie de la Garde. Alors la situation se renverse. Au terme d’un combat
épique, les escadrons français reprennent le dessus avant même l’intervention
des gardes à cheval (comme historiquement, seuls les dragons ont donné) : Grouchy a retourné la situation. Enfin, l’infanterie
de Mortier a amorcé sa poussée dans le prolongement de Verdier/Bruno en
direction du plateau dégarni par les Russes. En soutien, Bruno a aussi fait
avancer l’infanterie de la Garde.
Les grands combats de cavalerie de l'aile gauche française.
Christophe/Grouchy n'en revient pas d'être encore en vie
et Christian/Kollogribov se demande pourquoi tout cela a tourné en eau de boudin...
La division hétéroclite de Dupas avance à son tour dans le prolongement de Verdier et Dombrowski. Elle soutient ainsi le centre et son aile de cavalerie sous Grouchy.
Je parle de "division hétéroclite" car elle est formée d'infanterie française "classique", du 15ème de ligne en habit blanc, de la garde de Paris en habit rouge, d'éléments saxons en habit blanc également.
Vers Friedland, une tentative de
la garde russe est faite pour menacer le flanc droit de Lannes qui continue l'ascension du
plateau. Mais Jean-Pierre déporte quelques unités sur le ruisseau et la marche
des Russes est contenue.
Les troupes d'Oudinot corrigent les réserves russes.
Thierry, pressé de toutes parts, a fort à faire. Repoussé au centre, il tente de menacer le flanc de Lannes avec la garde russe qui sort de Friedland.
Mais Jean-Pierre bloque les tentatives de la garde de l'autre côté du ruisseau du moulin.
Après une fusillade nourrie de part et d’autre du Mühlenbach, l’arrivée des bataillons de Victor qui débouchent de Posthenen force
les gardes russes à rentrer dans la ville de peur d’être pris de flanc au
passage du ruisseau.
Sur la gauche russe, Bagration a repoussé Ney derrière le ruisseau.
Malheureusement pour lui, les renforts français conduits par Victor débouchent à Posthenen.
De plus en plus nombreux, ils marchent en direction de Friedland.
Tout en attaquant Lvov qui lie l'aile gauche au centre russe.
Au premier plan, Victor repousse Lvov.
Au fond, Bagration comprend qu'il est coupé du gros de l'armée et se replie.
Bientôt
le plateau centrale est quasiment pris. Le centre de Thierry va forcément
tomber sous peu, vu le nombre de bataillons qui l'accablent. Même si Friedland
n'est pas physiquement entre leurs mains, les Français ne peuvent que
l'emporter.
Comme historiquement, les restes de l’aile gauche russe vont se replier ou plutôt s’enfuir sur la rive opposée par le passage de Sortlack sous la protection (difficile) de la cavalerie tandis que Ney, Dupont et les dragons de Lahoussaye et Latour-Maubourg lancent la poursuite.
Au
centre, les derniers bataillons de Somov et Maliutin vont avoir bien des soucis
à se tirer de leur délicate situation car la pression d’Oudinot et Lannes va
être très forte. Et Victor va bientôt venir appuyer sur Friedland. Sur l’aile
gauche française enfin, les cavaliers russes très malmenés vont filer en
direction d’Allenburg par la rive gauche de l’Alle mais Grouchy va pouvoir
lancer la poursuite grâce à une deuxième ligne intacte et au renfort de la
cavalerie de la Garde.
En
clair, on marche droit vers Tilsit, avec un résultat au moins aussi
catastrophique voire pire que celui de la bataille historique pour les Russes.
A 18h30-19h du temps réel, la
défaite de l’armée du Tsar était donc consommée et il était logique que
Bennigsen fasse retraite. On a arrêté de jouer car la suite n’aurait été qu’un
bonus sanglant et sans renversement possible, même si Thierry pouvait peut-être
encore espérer tenir un peu au centre et surtout vendre chèrement sa peau avec
la garde dans Friedland même.
Je suis ravi de voir que la
journée nous a suffi (incluant la pause déjeuner) pour mener à bien cette
bataille. Donc la règle fonctionne bien et mon scénario aussi, même si je pense
que cela tient aussi beaucoup au comportement des joueurs. Par exemple
Jean-Pierre, avec les divisions Oudinot et Nansouty, n’a pas hésité une
seconde. Dès le premier tour, il s’est résolument avancé vers le plateau qui
domine Friedland pour empêcher les Russes de prendre l’offensive sur la route
de Königsberg et y bousculer leur centre.
En face, les généraux russes
(Thierry plein centre et Christian à l’aile droite) avaient choisi de répartir
leur artillerie sur tout le plateau. C’était pas bête puisqu’ils ne savaient
pas d’où viendraient les coups mais Jean-Pierre n’a pas eu à faire face à des
tirs massifs ni très décisifs malgré la masse que l’artillerie russe aurait pu
fournir et son attaque n’a jamais été enrayée.
Les Russes déplorent la perte de
leurs deux meilleurs généraux, Bagration et Doktorov, témérairement attachés au
combat. Les pertes françaises sont quasi insignifiantes face au désastre des
Russes. Chose extraordinaire, nous n’avons perdu entièrement que quelques
escadrons de cavalerie et aucun bataillon d’infanterie, même si certains
étaient bien entamés ! En échange, les Russes ont perdu beaucoup plus de
troupes mais moi, j’en ai perdu le compte. J
Bref, une bonne journée que le
WOC s’est promis de reconduire.
EDIT : Après calcul rapide, il y avait à vue de nez 1800 fantassins et plus de 350 cavaliers sur la table + 71 pièces d'artillerie et leurs servants. Les Français avaient une nette supériorité en infanterie (presque 1000 contre un peu plus de 800) que les positions en hauteur et l'artillerie russe n'ont pas su compenser. Le succès ne vient donc pas par hasard.
8 commentaires:
Impressionnant et très sympa à lire
Il ne faut jamais arriver en retard à une réunion d'état major!!! Cela symbolisera le brouillard de guerre...Bon, j'ai rarement vu une salle (et une table) aussi magnifique! Ca doit être très sympa (et atmosphérique) de jouer dans ces conditions...et très belle bataille, bravo!
Très agréable journée due à une organisation hors pair, une scénario très bien préparée, de belles figurines,...C'est définitivement à refaire !
C'était ma première expérience d'une bataille avec 9 joueurs et en découvrant la règle de Franck.
Tout a été une grande réussite. L'accueil de Christian a été d'une rare gentillesse.
Franck a réussi à adapter parfaitement le scénario avec les ordres de bataille.
Ce qui a fait que l'engagement a été parfaitement équilibré.
Ce compte rendu reprend parfaitement l'historique du combat avec son intensité et ses moments critiques.
En fonction de mes disponibilités, je suis bien sur volontaire pour une autre bataille. Je regrette de ne pas avoir pu participer à 'Dresde'.
Bon, certs, je suis arrivé en retard au briefing, mais les généraux Russes étaient souvent bourré, donc ca peut coller à la réalité. :)
En tout les cas, une super partie, et une trs bonne journée de jeu.
J'ai pas dit que t'étais arrivé à jeun, remarque. :)
Merci à tous pour vos commentaires, les gars.
Et merci aussi à Christian pour son accueil, sa disponibilité, ses décors et armées gigantesques. Si je lui suggérais qu'on fabrique les Alpes pour y faire passer Hannibal ou Bonaparte, je suis sûr qu'il serait partant
C'est un plaisir pour moi aussi de pouvoir enfin mettre en place de telles batailles. :)
What a magnificent looking game - well done gentlemen!
Many thanks Carlo ! Happy you like it :)
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