mercredi 8 mai 2019

Shiloh - le compte-rendu


La bataille de Shiloh s’est tenue les 6 et 7 avril 1862 sur les rives du fleuve Tennessee. Nous l’avons rejouée le 6 avril dernier.

Nous étions 8 joueurs, à manipuler 130 régiments d’infanterie et plus d’une trentaine de batteries d’artillerie soit près de 90 canons sur une table de 1,80 x 6 mètres. Une belle rencontre pour une de mes batailles préférées que je voulais jouer en intégralité depuis bien longtemps.

Notre bataille commence vers 9h00 du matin, lorsque la division Prentiss reflue en grand désordre, avec les rebelles à ses trousses. L’initiative est pour les confédérés mais le premier tour est précédé par une sorte de « mouvement 0 » pour Prentiss uniquement (les autres troupes nordistes présentes sur la table restent immobiles), ainsi qu’une série de « tests de ralliement » qui nous donne la portion de ses troupes que le général unioniste est parvenu à garder sous ses ordres (le resta ayant pris la fuite).

Les troupes de Prentiss se carapatent

Le problème pour nous, joueurs sudistes, c’est que les jets de ralliements de Christian / Prentiss sont très bons. Il peut donc rapatrier presque toute sa division et tous ses canons vers l’arrière pour former une nouvelle position de défense. Ça commence bien…

Bref, la division nordiste, en désordre, part du bord de table sudiste au centre de la table, et effectue un premier mouvement. Les carrefours de Barnes et Davies Fields qui sont à proximité comptent comme des objectifs mais Christian est prévenu : ses troupes sont encore très secouées et si elles tentent de résister sur des positions si proches de l’ennemi qui les talonne, elles devront subir des tests de moral. En cas d’échec, c’est la fuite. Si en revanche, elles poursuivent leur chemin vers le tiers de table US, elles peuvent se reformer en ordre.

Christian ne prend pas de risques et se contente de laisser un régiment pour retarder les poursuivants tandis que le reste des troupes se précipitent vers l’arrière pour s’y reformer et s’y ravitailler en munitions.

Au même moment, sur la gauche confédérée, les troupes du général Hardee se mettent en mouvement vers les régiments de Sherman positionnés autour de l’église de Shiloh qui trône sur une petite crête. Habituellement, je dirige les troupes qui arrivent les dernières sur la table, ce qui me permet de gérer les premiers tours et d’épauler les joueurs débutants, mais exceptionnellement j’ai fait l’inverse. Hardee est mon général sudiste de prédilection, j’ai donc décidé de me l’attribuer et je joue le premier. Juste à ma droite, Philippe joue sa première partie de figurines. Il sera Leonidas Polk, le Fighting Bishop, et dirige énergiquement ses brigades droit devant lui. Après un court conciliabule, nous avons convenu qu’il épaulerait mon attaque en enveloppant la droite de Sherman. Ce dernier est joué par Christophe qui regarde avec une certaine appréhension les 6 brigades sudistes qui convergent sur ses positions.



Effectivement la brigade Cleburne chasse rapidement les régiments que Sherman a postés sur un premier monticule. Mais les nordistes en ont profité pour s’installer solidement sur la crête de l’église.
La division de Sherman est en position autour de l'église de Shiloh


Dès le tour 2, Jérémie/Bragg entre au centre de la table à la poursuite des troupes de Prentiss qui refluent vers la position qui sera plus tard connue sous le nom de Sunken Road. Il est efficacement ralenti par le régiment que Christian a laissé en arrière-garde. Sur l’aile gauche nordiste, les premières unités de Hurlbut (joué par Bruno) arrive sur la table au niveau de Wicker Field. 
Le général Bragg installe son poste de commandement dans la champ du fermier Davis...

…tandis que ses troupes marchent à la poursuite de l'ennemi…

… qu'elles vont bientôt rejoindre sur la Sunken Road.


De notre côté, l’attaque continue. Je place mes batteries sur le monticule face à l’église et un meurtrier duel d’artillerie s’engage. Les tirailleurs nordistes viennent canarder mes artilleurs que je dois rapidement dégager avec un régiment d’infanterie, sous peine de les voir se faire flinguer à courte portée.
Sous le feu de mes canons efficacement épaulés par ceux de Polk, la ligne de l’Union souffre terriblement.
L'artillerie de Hardee

...et celle du général Polk

A ma droite, Philippe a commencé à déborder l’aile gauche de Sherman en franchissant la Shiloh Branch en direction de Review Field. Mais en arrivant à portée de vue de celui-ci, il a la désagréable surprise de voir la brigade Raith sortir en ordre de ses cantonnements, appuyée par la batterie Schwartz. Il doit réorienter une partie de ses troupes pour faire face à ce nouveau danger tandis que je m’engage dans un meurtrier échange de tirs avec Sherman. Malheureusement ma brigade de gauche sous le commandement du colonel Pond refuse de bouger : mes jets de commandements sont ridicules et ne m’octroie qu’un pauvre PC, ce qui ne me permet pas d’avancer efficacement pour envelopper la position de l’église. Cette situation va s’éterniser pendant plusieurs tours. Ceci laisse le temps à Christophe/Sherman d’avancer les unités de son second échelon et de former une ligne de défense continue.



Au centre sudiste, Bragg continue d’avancer mais en face, Prentiss se renforce avec l’arrivée des premières troupes du général W.H.L. Wallace. Christian qui joue généralement très offensif a visiblement décidé de s’installer dans le chemin creux où sa ligne s’épaissit un peu plus à chaque tour.
Le général Prentiss réorganise sa ligne…

...qui est bientôt menacée par les troupes de Bragg

Sur notre droite enfin, Brian (qui joue le rôle de notre général en chef A.S. Johnston) entre enfin sur la table avec ses deux premières brigades et avancent en direction du champ de Sarah Bell. Malheureusement alors qu’il passe à proximité de cantonnements nordistes abandonnés, il doit faire un test qui échoue : un de ses régiments affamé se rue dans le camp US et commence à se livre au pillage, brisant la cohésion d’une de ses brigades.


Pendant ce temps, en face de lui, Hurlbut se renforce peu à peu. Les sudistes hésitent à traverser le champ de coton de Sarah Bell sous le feu dévastateur qui leur est promis. Heureusement, deux autres brigades sous les ordres de Breckinridge viennent renforcer Johnston sur sa droite. Elles avancent aussitôt le long de la route de Pittsburg pour attaquer la gauche de Bruno/Hurlbut.




A quelques kilomètres de là, tandis que les lignes adverses se fusillent autour de l’église, les troupes du général McClernand pénètrent à leur tour sur la table, entre Sherman et Prentiss. Philippe/Polk ne se laisse pas émouvoir par ce nouvel adversaire et décide même de lui épargner une partie du chemin. Il marche avec résolution contre lui au-delà de Review Field.

McClernand se prépare à affronter les rebelles de Polk

Grant lui-même dirige les renforts vers les points les plus menacés

Bientôt la fusillade est ininterrompue depuis notre aile gauche jusqu’à Duncan Field à proximité duquel Bragg lance sa première attaque sur le chemin creux. Il est évidemment repoussé mais en bon psychopathe, il ne rechigne pas à renvoyer ses hommes au massacre ! Une brigade de Polk est d’ailleurs venue lui prêter main forte sur sa gauche, ce qui a pour conséquence de réduire notre ligne à une fine pellicule de troupes sur ma droite. Je le signale à Philippe/Polk masi ça ne semble pas l’inquiéter du tout, tout occupé qu’il est à s’écharper avec McClernand.


La brigade du colonel Gibson, menée par les Avegno Zouaves du 13e de Louisiane,
se casse les dents sur le chemin creux


Pendant ce temps, Sherman repousse une première attaque sur l’église et Pond refuse toujours de coordonner ses mouvements avec mes autres brigades. Il commence même à prendre cher sous le feu de la brigade nordiste de McDowell. Heureusement pour lui, le 18th de Louisiane entre subrepticement sur la table sur le flanc de la ligne bleue et ouvre le feu dans son dos, créant un certain désordre chez l’ennemi.
Les régiments de recrues de la division Sherman résistent...
… mais derrière ceux qui tiennent bon, les fuyards sont déjà nombreux.

Sur mon centre, les brigades de Pat Anderson et Buckland se réduisent mutuellement par le feu et les premières déroutes se produisent.


La situation semble se figer. Les positions fédérales du Hornet’s Nest et de la Sunken Road tiennent le choc sous les assauts répétés de Jérémie/Bragg. Sur notre droite, les troupes de Breckinridge ont dépassé la ferme de Sarah Bell et s’apprêtent à attaquer la ligne d’Hurlbut lorsqu’apparait la brigade nordiste de Stuart dans leur dos. Johnston doit faire face à deux adversaires et j’ai bien cru qu’on allait le perdre, comme dans la réalité.

Le général Johnston encourage ses hommes pris entre deux feux

Mais au menu des surprises de notre reconstitution, Sidney Johnston et Gladden ont échappé à la tuerie ainsi que le colonel Peabody. En revanche, alors que les tirailleurs de Sherman avaient déjà failli faire la peau à Hardee dès le deuxième tour, Christophe m’a finalement flingué Cleburne en repoussant sa deuxième attaque sur la crête de l’église puis au tour suivant Pat Anderson sur un tir d’artillerie. Ceci a stoppé mon mouvement d’attaque pendant un tour avant que des subalternes ne prennent leurs places.

La brigade du Kentucky du colonel Trabue arrive en renfort derrière Hardee

Sur ma gauche, le colonel Pond qui s’est finalement décidé à faire un bon jet de commandement (au 5e ou 6e tour, je crois !) passe à l’offensive et piétine les débris de la brigade McDowell, heureusement érodés par le feu.

Un régiment de Louisiane, son drapeau au pélican flottant au vent, se rue sur les hommes de McDowell

Mon centre ne bouge toujours pas mais il combat – et fond – par le feu. D’abord avec la brigade Buckland qu’il parvient à repousser, puis sous les tirs de la batterie Morton.
Finalement le colonel William B. Bate qui a remplacé Cleburne emporte la colline de l’église grâce au soutien de la brigade du Kentucky de Trabue arrivée en renfort et aux tirs de Polk/Philippe.
La position de l'église est enlevée par le colonel Bate

Des troupes du Kentucky  marchent à l'ennemi

Ce même Polk, un temps menacé par Michel/McClernand, parvient finalement à le contenir et repousse les troupes de Prentiss sur sa droite. Mais au centre, la ligne US tient ferme le long du chemin creux. En face, les troupes de Bragg sont clairsemées.


Heureusement Johnston/Brian a réussi à se sortir du mauvais pas de Stuart et après avoir réduit cette brigade en lambeaux, commence à culbuter Hurlbut. Des régiments sudistes se risquent enfin à traverser le champ de Sarah Bell où ils vont s’annihiler avec leurs vis-à-vis.

Les rebelles montent à l'assaut aux abords de la ferme de Sarah Bell.

Comprenant le danger, Christian commence à envoyer des renforts tirés du centre, mais la bataille touche à sa fin.

Au total, nous avons 5h30 à 6h de jeu.

La grande batterie du général Dan Ruggles n'a pas été déployée dans notre jeu

A raison de 30 minutes par tour, cela correspond donc à 4h ou 4h30 de combats. Ceci nous a permis de représenter les évènements qui se sont réellement déroulés de 8h30-9h jusqu’à 15h environ.

Et finalement nous ne sommes pas si loin de notre modèle historique.

Sherman s’est battu comme un diable depuis le tour 2 (nos troupes étaient très proches dès le départ) jusqu’à la fin (tour 8 ou 9 ? on a perdu le compte). Mais de ses 9 régiments, il ne reste pratiquement plus de survivants. Ceux de Raith, venus le renforcer, ne sont guère en meilleure forme.

Au centre, la ligne US tient encore mais Brian/A.S. Johnston commence à se rabattre sur le Hornet’s Nest et seule la fin du jeu semble avoir sauvée Hurlbut de la destruction.

McClernand n’est pas trop mal en point mais avec Hardee qui va venir épauler Polk contre lui, il n’a plus guère de possibilité que de se replier, comme dans la réalité, ou se relier à Prentiss et se voir condamner à l’encerclement (également historique) du Hornet’s Nest – ce qui serait une conséquence désastreuse pour l’armée de Grant qui perdrait ainsi une autre division capturée.

Donc, sans parler d’une franche victoire, notre Shiloh se termine sur une situation plutôt favorable aux sudistes. Mais les pertes sont lourdes pour eux aussi.



Organiser Shiloh, une bataille qui s’est passée tout en profondeur sur une table de 6 mètres de long par 1,80 de large est une gageure. J’avais donc pris l’option de ne jouer qu’une partie de l’action, surtout que notre règle, très « tactique », ne permet que rarement les très grands mouvements de type stratégique. Or les mouvements de grande ampleur de la droite US sont surtout le résultat des déroutes et fuites successives des unités de Sherman et McClernand, et de la poursuite effrénée des rebelles qui leur étaient opposés. Ceci est souvent difficile à rendre avec le jeu de figurines, sans compter le nombre de fois où nos rencontres ludiques réécrivent l’Histoire.


Bien sûr à la fin de notre reconstitution, la division Sherman n’existe plus. Mais c’est surtout la configuration de notre table qui veut ça, et la psychologie des joueurs. Si nous avions pu bénéficier de la même profondeur de terrain que dans la réalité, on peut parfaitement imaginer que ces troupes aient fait le même mouvement en arrière. Mais évidemment, les joueurs ne partagent pas les mêmes enjeux que les acteurs des faits réels. Un joueur est là pour « se cartonner » avec son vis-à-vis, donc il est difficile d’imaginer que Sherman va s’enfuir dès qu’il voit arriver un peu plus d’ennemis qu’il n’a d’hommes ! J

Un mot sur les entrées des troupes :
En théorie, avec une durée d’environ 30 minutes pour un tour de jeu, les entrées en jeu des différents protagonistes auraient dues être plus étalées que dans notre scénario. La chronologie précise de la bataille est difficile à établir mais on peut dire que Sherman est attaqué vers 7h00 du matin et que les premières troupes de Breckinridge s’engagent à l’autre bout du champ de bataille vers 9h30 environ.

Or l’objectif de nos grandes batailles est évidemment que tout le monde puissent jouer et se faire plaisir, ce qui est difficile si on laisse les combats débuter d’un côté de la table et les troupes entrer, ne serait-ce que 3 tours plus tard de l’autre côté. Nous savons par expérience qu’une fois l’action d’une dizaine de régiments engagée, les tours de jeu commencent à durer et le risque est grand de voir une partie des joueurs se tourner les pouces pendant que les autres s’écharpent joyeusement.


3 commentaires:

L'Empereur a dit…

The place to be !
C'est magnifique !
😎

Tfigs a dit…

Bravo !
Je me suis régalé à lire ce compte-rendu !
Bientôt de la Guerre civile pour moi aussi, mais en beaucoup plus petit ! ;)

Apa a dit…

Merci à vous !

Petites annonces

Ces figurines sont à vendre !!

Minis for sale !!


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